Photographie d'un éclair frappant un champ vert vide. Le ciel est rempli de plusieurs nuages sombres chargés de pluie. Dans la partie droite de la photo, il y a un trou dans les nuages où un ciel bleu profond et un coucher de soleil jaune-orange apparaissent.

Auditoire (im)médiat

hypermédialité, téléprésence, fandom et fantômes numériques

Samedi 26 juin 2021 | 09 h 30 - 11 h 00

Séance simultanée en direct sur Zoom en anglais. Aucune interprétation en langue des signes ou traduction ne sera proposée pour cet événement.

(PRÉSIDENCE : ROBERTA BARKER) LIN CHEN, NAOMI P. BENNETT, SEAN ROBERTSON-PALMER & CAITLIN GOWANS

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Ré-incarner les fantômes (digitaux) en tant que figures posthumaines sur la scène et sur la page

CAITLIN GOWANS

L’image de l’hôte de la réunion est figée, mais elle n’est plus là. Elle est partie réparer son routeur pour que la réunion puisse se poursuivre sans pépins, mais son image, son fantôme numérique, reste présente. Bien sûr, aucun.e d’entre nous n’est vraiment « là » au départ. Le support numérique de la rencontre nous donne l’illusion que nous sommes présent.e.s au même endroit tout en insistant sur le fait que nous sommes en direct et nous rappelle pourtant que nous ne sommes pas et ne pouvons pas être ensemble. En plus d’être une source de frustration lors de nos tentatives de nous rassembler dans des moments extraordinaires, ces glitchs (images figées), qui relaient notre présence spectrale sur les médias numériques, riment avec la façon dont nous comprenons les fantômes sur scène.

Dans cette présentation, je montrerai que la présence incertaine de fantômes sur la page et sur scène, incarnés par des acteur.trice.s vivant.e.s, contribue à un type de cartographie du corps que revendique N. Katherine Hayle comme qualité inhérente au posthumain, aux côtés de la matière et de la matérialisation du sens mises en avant par Karen Barad.

Les pièces de debbie tucker green sont hantées par des fantômes qui sont rongés par le désir d’être présents avec les personnages vivants sur scène. Les ancêtres de la vérité et de la réconciliation sont témoins de leurs descendants sur les lieux du génocide et de la guerre civile tandis que les fantômes dans une dévotion profondément affectueuse et passionnée à quelqu’un (— nom), déplacés à la fois par la grammaire du titre et leur présence précaire, cherchent des moyens de créer un lien humain tout en étant à la fois présents et absents. En rencontrant ces esprits, j’étudierai ce que les fantômes théâtraux de l’humain et du posthumain peuvent nous dire sur nos propres fantômes numériques.

Notice biographique
Caitlin Gowans est doctorante au Centre for Drama Theatre and Performance Studies de l’Université de Toronto. Sa thèse porte sur les performances posthumaines de l’identité dans le théâtre contemporain au Royal Court Theatre de Londres, au Royaume-Uni.

Ensemble-séparés : hypermediacy et théâtralité dans la production théâtrale de The Tempest sur Zoom

LIN CHEN 

Tandis que de nombreuses compagnies de théâtre luttent pour survivre durant la pandémie de COVID-19, une production innovante de La Tempête a remporté un succès étonnant. Cette version abrégée de l’œuvre de Shakespeare, co-réalisée par la compagnie Creation Theatre d’Oxford en Angleterre et par Big Telly d’Irlande du Nord, est jouée en direct grâce à la plateforme de vidéoconférence Zoom. Un facteur majeur qui pourrait expliquer ce succès : cette production crée un sens de communauté dans l’espace virtuel pour les acteurs et les membres du public qui sont physiquement séparés durant le confinement. Cependant, plutôt que d’essayer de créer l’illusion d’intimité de la normalité précovid, la pièce intensifie la reconnaissance de l’isolement physique propre à la réalité actuelle. Ainsi, comment le paradoxe apparent de lien et de séparation peut-il être résolu ? Cette présentation défend que c’est parce que les compagnies Creation et Big Telly adoptent une approche théâtrale ouverte en plus d’un langage cinématographique tout en embrassant la logique de l’hypermédiateté dans son utilisation d’une plateforme virtuelle. En établissant le contrat théâtral spectateur.trice-acteur.trice reconnaissant la dualité entre le théâtral et le réel et en transférant ce contrat vers la sphère virtuelle, la production juxtapose de façon équilibrée le lien médiatisé à la séparation matérielle.

Lin Chen est candidate au doctorat au département d’art dramatique de l’université d’Exeter. Sa recherche examine l’interaction entre le cadre théâtral et les médias numériques des performances en ligne réalisées durant la pandémie de COVID-19.

Rétablir la connexion grâce à la téléprésence.

NAOMI P. BENNETT

À cause de la pandémie de COVID-19 et des confinements à domicile qui ont frappé la planète au début de 2020, de nombreuses personnes se sont tournées vers des outils de vidéoconférence tels que Zoom afin de combler leur besoin de contact humain. Les industries des affaires, de l’éducation et du divertissement ont trouvé des moyens créatifs de s’adapter tandis que les ami.e.s et les proches séparé.e.s par la distance géographique se sont retrouvé.e.s sur l’espace virtuel. Nourries par la nécessité et le besoin de retrouver un sens de connexion, les performances en ligne se sont efforcées d’inclure des éléments interactifs afin de compenser cette expérience de solitude.

Cette conférence analysera trois performances basées sur une reconnaissance de la solitude caractérisant l’isolation : The Telelibrary, une performance téléphonique interactive de Yannick Trapman-O’brien; Play in Your Bathtub, une performance acoustique interactive d’isolement dirigée par Erin Mee de This is Not a Theatre Company et dist[Sense], une expérience virtuelle de contact physique créée afin d’entrer en connexion sur l’espace Zoom. Chacune de ces trois performances mobilise la connexion sensible afin d’impliquer un public composé d’un.e seul.e participant.e dans une expérience de connexion intime avec autrui : ils ou elles sont à la fois ensemble et séparés. Grâce à la relation individuelle avec le.la participant.e-auditoire, chacune de ces performances parvient à redéfinir la connexion à sa manière et mobilise la téléprésence afin de créer de nouvelles possibilités de connexion intime malgré la distance.

Notice biographique

Naomi Bennett, Ph.D., MFA, est universitaire, éducatrice, et parfois actrice à Bâton-Rouge, en Louisiane aux États-Unis. Ses recherches actuelles et sa pratique artistique concernent la création de performances interactives qui engagent physiquement une expérience incarnée grâce aux technologies des médias virtuels. Les travaux de Bennett visent à activer les sens du toucher, de la vue et la proprioception en mobilisant des médias traditionnellement désincarnés.

Forum de fans, pratiques d’archivage et mémoire culturelle

SEAN ROBERTSON-PALMER

Cette communication retrace la transformation des forums numériques de fans en espaces importants pour la préservation et la contestation de la mémoire culturelle accordée aux battles de rap pendant la pandémie de COVID-19. En enquêtant sur la prolifération du contenu créé par les fans qui a émergé au fur et à mesure que les mesures de confinement à domicile ont été émises au Canada tout au long de 2020, je positionne la pratique consistant à téléverser, partager et juger du contenu des battles de rap comme un répertoire de travail translocal des fans. Ce travail effectué par les fans adapte la tradition des battles de rap en fonction de son contexte numérique. De façon collaborative, il mène à des résultats sociaux, pédagogiques et performatifs. Je postule que la force des forums de fans réside dans leur capacité à créer de nouveaux modes d’engagement résilients qui permettent à la culture des battles de rap de survivre en l’absence d’événements en direct.

À travers les actes de diffusion et de critique du contenu numérique, les fans cartographient l’histoire de la culture des battles de rap et de ses pratiques contemporaines, tout en faisant intervenir des discours interculturels complexes sur des questions de race, de genre et de liberté d’expression. Les fans créent et diffusent des significations dans le contexte des forums dédiés au battles de rap à travers leur analyse détaillée de la politique et de l’esthétique intégrées dans le contenu dirigé par les fans. La coproduction et la contestation perpétuelles inhérentes aux discours numériques des battles de rap empêchent l’émergence d’un récit hégémonique singulier, usurpant ainsi les hiérarchies présentes dans les pratiques archivistiques traditionnelles.

Notice biographique

Sean Robertson-Palmer est actuellement professeur adjoint (contrat à durée limitée) à la School of Arts, Media, Performance and Design de l’Université York à Toronto, au Canada. Il est spécialiste du théâtre collaboratif, de la performance numérique et de l’histoire du théâtre. Sean est aussi un interprète interdisciplinaire dont le travail a été présenté au Théâtre Passe Muraille, à la Nuit Blanche de Toronto et au Festival Summerworks. Ses écrits sur la musique, la culture pop et la mode ont été publiés dans GQ Magazine et ses écrits sur la performance hip-hop et les fandoms seront publiés dans la prochaine anthologie Hip Hop Archives: The Politics and Poetics of Knowledge Production, sous la direction de Mark V. Campbell et Murray Forman.